LES AÏNATS
Voix d’ancêtres
Ancêtres du terroir, pourquoi me hantez-vous ?
Le passé sous mes yeux n’est qu’un livre d’images,
Mais vous avez laissé sur ses plus belles pages
L’ombre de vos portraits impassibles et doux.
Comme il est loin le temps où, sous des mains tremblantes,
Tressaillait le rabot du petit menuisier
Qui le soir, au reflet de lueurs vacillantes
Suspendait sur son seuil mes courses d’écolier.
Je ne vois plus passer, à l’ombre des platanes,
Assis sur ses épis doucement cahotés,
Le vieillard qui plongeait dans les nuits diaphanes
Ses yeux de vétéran amoureux des étés.
Et le vieux forgeron à la barbe d’apôtre
Qui martelait l’enclume et chantait au lutrin ?
Aïeux, aïeux dont l’âme a tant bercé la nôtre
Qu’est devenu l’accord de votre effort serein ?
Vivre, sans que jamais la divine étincelle
S’éteigne en nos foyers comme en notre raison,
En puisant dans l’épreuve une vigueur nouvelle
Pour retourner sa terre et semer la moisson.
Simples mots, mots empreints de magique espérance
Que j’entends résonner comme un écho vainqueur,
C’est vous, vieux paysans, emblême d’endurance,
Qui les avez gravés, tout vibrants, dans mon cœur.
André descat