L' Aïgordentaïre
A la mi-automne, on voyait sur les routes ou sur la place des villages, prés d'un point d'eau, l'alambic du distillateur ambulant (l'aïgordentaïre ). Cette volumineuse "machine à goutte"comprenait une chaudière, trois vases, et un serpentin à l'extrémité duquel se situait le col-de-cygne par où coulait l'alcool obtenu.
Partout dans les campagnes, on conservait, au long du printemps et de l'été, des fruits dans des tonneaux où ils fermentaient, atteignant déjà un fort taux d'alcool
La distillation séparait les différents éléments de ce mélange et concentrait l'alcool et l'essence des fruits en laissant dans les cuves le résidu. Pour avoir le droit de transformer sa récolte en alcool, le paysan devait disposer d'un privilége de bouilleur de cru qui l'y autorisait sans que le fisc pût prélever une taxe. Autrement, il lui fallait acheter ce droit à l'état chaque année. Muni du précieux document, il apportait ses fruits macérés à l'alambic qu'environnait une puissante odeur d'alcool et de moût putréfié, autour duquel bourdonnaient les insectes. La distillation ne constituait qu'une activité saisonnière pour laquelle le distillateur était payé à la quantité de fruits apportés.
L'alcool était indispensable: il accompagnait les fêtes et les grands repas et constituait un désinfectant universel. A une époque où, dans les cours de ferme, le voisinage du tas de fumier et du puits contaminait l'eau, l'usage d'additionner d'alcool toutes les boissons éliminait certains risques. Il entrait aussi dans de nombreux remèdes, pour l'homme ou pour le bétail.
Aujourd'hui encore à Bénac, durant l'hiver, vous pouvez amener vos fruits macérés au distillateur ambulant. En effet un jeune du pays a pris la suite de l'ancien distillateur. Un alambic, semblable à celui que vous avez devant vous, mais en bon état de marche lui permet de maintenir cette activité ancestrale.